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Ceci n’est pas un blog

(note de service)

mardi 7 février 2012, par Valentin.

Eh bah oui, sinon ça s’appellerait [Le Blog]. Pas [Le Site]. Duh.

Alors, voilà.

Depuis que j’ai ouvert ce [Site] dans sa première version (ce devait être fin 2004) — je ne lui ai toujours pas trouvé de nom depuis tout ce temps —, je ne compte pas le nombre de fois où des élèves (ou leurs parents) m’ont félicité pour « mon blog ».

Pas plus tard qu’à l’instant, tenez, ma propre mère vient de me décerner son titre de « blog préféré » (en quatrième position sur cinq, parce que quand même, hein).

J’ai hélas dû décliner, tout flatté que je puisse être.

Car, tenez-vous bien, ceci n’est _pas_ un blog.

Qu’est-ce qu’un blog, au fait ?

La définition repose sur des principes techniques (les blogs sont en général tenus par une personne unique, présentés en premier lieu sur une seule page par ordre chronologique inverse, autorisant les commentaires), sur des usages récurrents (plateformes centralisées de type blogspot/overblog/etc., systèmes de gestions de contenu type Wordpress ou Dotclear), mais aussi et avant tout sur le type de discours qui s’y tient.

blog est une apocope de web log, log étant ici l’aphérèse de logbook, qui désignait le cahier du capitaine d’un navire à voile au XVIe siècle, lorsque l’on jetait à la mer des logs (bouts de bois) pour repérer le sens des courants. En d’autres termes, il s’agit premièrement d’un _journal_ personnel (journal « extime », comme je l’expliquai ailleurs), construit comme un flux de billets progressant dans le temps et rarement modifiés après leur mise en ligne.

Bref, la dictature de l’instantané, de la réaction à chaud ou de l’humeur de l’instant.

J’ajouterais que nommer, de façon systématique, « blog », tout ce qui n’est pas « site officiel » (entendez : géré par une entreprise ou une institution), ne me semble pas sans effets pernicieux potentiels. C’est créer une classification arbitraire en estimant que tout citoyen qui s’exprime en ligne — que nous ne désignerons plus qu’en tant que blogueur — se trouve pris dans un ton, une écriture, un format bien particulier, qui se caractérise au premier chef par sa volatilité. De telles dichotomies purement spécieuses, et potentiellement idoines à toutes les récupérations politiques, sont exactement ce contre quoi je lutte ici (j’ai déjà abondamment pourfendu la distinction « amateur/professionnel », dont le terme blogueur n’est au fond qu’un nouvel avatar).

Non qu’il n’existe pas de vrais blogueurs, nombreux et parfois talentueux, qui font aujourd’hui merveille en matière, par exemple, d’humour (les Lulz), de lancement d’alerte, de vigilance citoyenne et d’analyses politiques (je ne mets pas de liens, il y en aurait trop). À tel point que ce phénomène doit conduire à une nécessaire et urgente réévaluation du métier de journaliste.

Mais, si j’ai effectivement fini par me retrouver seul auteur de ce [Site] (à quelques invités près, qu’il ne tient d’ailleurs qu’à vous de rejoindre, amis lecteurs), il ne traite que très peu de sujets d’actualité ou de ma vie personnelle (sauf éventuellement à titre de témoignage, à l’occasion et notamment lorsque je présente mes pièces), comporte tout juste quelques textes fantaisistes, et quelques « billets d’humeur » qui se veulent plutôt le point de départ d’une réflexion élaborée.

Dans l’ensemble, [Le Site] est donc moins un « journal » qu’une manière d’archive, peut-être documentaire (et sans doute assez chiante, disons-le). J’essaye ici de me présenter tel que je suis (ou aimerais être) dans l’absolu, et non tel que je suis ou me sens ici et maintenant, aujourd’hui ou hier.

Mais bon, ça fait quand même plaisir d’être le « blog » (ou pas) « préféré » (ou pas) de quelqu’un.

Fût-ce sa propre maman.

Ou pas.

Valentin.

Messages

  • Bonsoir

    en somme, vous distinguez : le « siteur » - pardon, [Le Siteur], exprimant son Moi-dans-l’Absolu (?), domicilié virtuellement en face - ou, disons-le tout à trac, à l’étage du dessus, par rapport au « blogueur » dont les posts ne sauraient refléter que de volatiles émanescences égotistes, l’écume des jours... Je ne saurais, je vous l’avoue, respirer sur ces hauteurs olympiennes où l’oxygène est raréfié. Je quitte l’absolu pour redescendre dans l’éphémère revendiqué du BLOG, le mien, celui de votre maman comme vous l’écrivez... Il y a en vous un côté « Je hais le mouvement qui déplace les lignes », d’un anachronisme surprenant à mon sens.

    Voir en ligne : http://oulipia.free.fr/

  • Lecteur occasionnel de [Le Site], je m’inscris cependant en faux contre l’avis tout personnel que vous faites, cher auteur, des caractéristiques d’un blog. A mon sens, le contenu d’un blog est certes essentiellement fourni par une personne, et reflète à ce titre une partie de ses pensées ; toutefois, il n’y a pas d’impératif d’immédiateté ou d’humeur.

    Beaucoup de blogs que je suis sont par exemple techniques : ils sont alimentés par leurs auteurs de manière très épisodique, au gré de l’évolution de leurs connaissances et/ou développements ; et leur contenu est donc très peu axé sur (i) l’humeur (ii) de l’instant, l’objet (technique) étant essentiellement extérieur à l’individu. Une définition trouvant grâce à mes yeux pourrait être « site web (+/-) personnel structuré en ’billets’ (pouvant ou non inclure des ’réponses’ des lecteurs) organisés sous forme chronologique ». Les blogs ont également fleuri avec les logiciels « moteurs » de blog, essentiellement dynamiques ; mais on trouvait déjà avant des sites structurés en logs, et on voit apparaître des générateurs de blogs statiques — la présence d’un moteur, le côté dynamique, et la possibilité de réponse ne sont donc pas pertinents comme critères systématiques de classification.

    Après, qu’une grande part de blogs soient centrés sur leurs auteurs, et alimentés à l’aulne de l’instantanéité, c’est une autre chose : la manière dont ils sont utilisés. On trouve également des sites qui ne sont pas structurés comme des blogs, voire qui incluent dans une (ou plusieurs) de leur sous-partie un blog. Donc une spéciation serait : site > blog > skyblog-like ;-) « Heureusement » pour le lecteur que je suis, les skyblogs tendent à disparaître au profit des réseaux sociaux.

    Bref, avec la définition proposée, essentiellement « structuraliste », ce [Le Site] est bel et bien un blog — désolé ! Mais s’il ne change de forme et de contenu, je suis assuré que sa qualité me le fera suivre encore longtemps...

    • Bonjour et merci pour cet échange,

      la tentative de définition que je propose ci-dessus repose effectivement sur une approche historique : ce n’est pas dit explicitement mais, maintenant que vous m’y faites penser, peut-être aurais-je dû le mentionner.

      Si ma définition du mot blog est sans doute restrictive, votre vision de « l’humeur » et de « l’instant » l’est autant : il ne s’agit pas nécessairement de raconter ses états d’âme ! Puisque vous parlez de blogs « techniques », j’en fréquente également un certain nombre, et j’y trouve parfois des articles tels que « aujourd’hui j’ai eu besoin d’installer tel et tel logiciel, voici comment je m’y suis pris », ou encore « ces jours-ci j’entends dire un peu partout que tel nouveau logiciel vaut mieux que tel autre, je pense que c’est faux et voici pourquoi ». Comme quoi un article technique peut également être dicté par « l’humeur de l’instant ».

      Certes, il arrive qu’un blogueur « technique » se lance dans une série de billets (une « somme », à vocation documentaire et définitive) pour explorer de façon méthodique toutes les facettes d’un logiciel ; mais dans une situation pareille, il me semble que le format « blog » est totalement inadapté : les articles se trouveront tôt ou tard noyés dans le flux, et en cas de sortie d’une nouvelle version il n’y aura plus qu’à sortir de _nouveaux_ billets plutôt que de mettre à jour les articles d’origine. Tout cela est, en fin de compte, assez frustrant pour le visiteur en quête d’un renseignement précis.

      Vous avez tout à fait raison de souligner que les choses ne sont pas si clairement délimitées que je le suggère, et que le paysage du web, disons, « personnel » a grandement changé ces quinze dernières années. Le plus souvent, néanmoins, je pense qu’un processus de « bloguisation » généralisée a été à l’œuvre, sur lequel je porte un regard critique. Le site de Sébastien Sauvage en est un bon exemple, pour rester dans les questions techniques : oscillant entre format « site » et format « blog », il a fini... par en cumuler les inconvénients. (Ce qui n’ôte rien à son talent.)

      Alors oui, peut-être ai-je un point de vue dépassé (de même que je n’oublie toujours pas que les noms de domaine en .com signifient « commercial », et que je hurle à chaque fois que je vois un citoyen ou une association se précipiter dessus stupidement). Mais être conscient de l’Histoire n’implique pas que l’on soit sensible aux modes :-)

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